De l’introduction à l’introspection : témoignage personnel

On est à Montréal, en janvier 2015. J’ai 24 ans. J’attends patiemment qu’on me serve au comptoir de la pharmacie du Jean Coutu. Du haut de mes privilèges de millénium blanche née dans un Québec laïque et de parents «qui gagnent bien leur vie» comme on dit,  j’ai tout pour réussir. La preuve:  j’ai déjà en poche un diplôme universitaire, que j’ai gracieusement obtenu suite à des cours terminés durant un échange étudiant en Espagne. Sérieux, quoi demander de plus! Du moins, c’est ce que je me laissais croire pour renchérir mon déni et enterrer mon désir viscéral de disparaître. 

Oui, tu as bien lu. J’étais très malheureuse et j’avais envie de disparaître. Je n’avais pas envie de me faire du mal, ni de me venger des mauvaises blagues de la vie ni de blesser qui que ce soit. Je voulais tout simplement et passivement disparaître, car je pensais cela apaiserait ma souffrance des derniers mois. J’avais tout pour réussir et j’avais aussi tout pour être heureuse. Mais de toute évidence, même si je réussissais,  je n’étais clairement pas heureuse. J’éprouvais un sentiment de solitude constant que je n’avais jamais connu. Entourée de personnes que j’aimais et qui m’aimaient, je me sentais terriblement seule. Je ne trouvais pas de sens ni à mes journées, ni à mes relations, et ni à mes choix. Je ne me sentais pas soutenue ni comprise par mon partenaire amoureux de l’époque. Les activités que j’aimais faire m’apparaissaient étrangement comme une tâche à compléter. J’éprouvais constamment une sensation de pression sur ma poitrine et j’avais beaucoup d’insomnie. Je ne me comprenais plus. J’avais des comportements que je ne reconnais pas. Je ne me reconnais pas. J’avais peur et j’avais honte aussi, parce que je me voyais devenir une personne que je n’appréciais pas. Pourtant, je continuais à me rabattre sur l’idée que je n’avais pas le droit d’être malheureuse, parce que j’avais tout pour réussir et j’avais tout pour être heureuse. À l'issue de ces pensées qui tournaient en boucle dans ma tête, mesdames Honte et Culpabilité étaient devenues mes colocs. 

Ce jour-là, alors que j’attendais que le pharmacien m’appelle, mon regard vide tomba sur le titre d’un livre. J’ai fait ma curieuse et j’ai feuilleté les pages de Maîtriser votre anxiété de Edmund Bourne et Lorna Garano. Au fur et à mesure de ma lecture, je sentais comme un bouillonnement se former dans mes tripes. Pas le genre de bouillonnement te donne la gastro, mais plutôt celui que tu ressens quand tu apprends que tu as gagné un prix. Moi, je venais de gagner quelque chose de précieux: Je venais de comprendre que ma souffrance portait un nom et qu’elle s’expliquait. Ce soir-là, en me couchant, je me rappelle m’être dite «je ne suis pas folle, je suis juste anxieuse». 

Tu n’as pas idée à quel point un livre ainsi qu’un simple mot, qui explique une souffrance, peut être thérapeutique! Cela a marqué le début d’un rétablissement, mais surtout l’éveil de la moi adulte, celle qui aligne sa vie et ses relations avec ses valeurs et ses rêves les plus précieux. 

Le parcours de ma vingtaine a été parsemé d’obstacles pour lesquels je n’avais pas été préparée: pertes, quêtes et découvertes d’identités à différents niveaux, questionnements et choix déchirants par rapport mon parcours scolaire et professionnel, conflits avec les parents, effritements des repères construits durant l’enfance, remise en question des valeurs, principes et vision de mes parents, quête d’autonomie et précarité financière, multiples déménagements, quête d'acceptation sociale, relation amoureuse insatisfaisante, découverte de d’autres cultures et remise en question de certains aspects de ma culture, peu de routine et de constance dans les saines habitudes de vie, etc. Pour rajouter à ces défis, voilà que je constatais que je vivais aussi avec de sérieux symptômes anxieux saupoudrés de symptômes dépressifs.

Alors, j’ai tout repensé. J’ai voulu aller mieux, j’ai espéré devenir plus heureuse et j’ai osé faire des changements. Et puis pour faire des changements, il fallait que je commence par comprendre que l’’ordre établi ne me convenait plus. Il fallait ensuite que je la brasse un peu. Ça a été un brassage majeur, si majeur que je nomme affectueusement cette époque de ma vie comme étant «ma crise de la quarantaine à 25 ans». 

Parmi les changements décisifs, il y a eut celui de changer de carrière et de retourner sur les bancs de l’école pour trouver un travail qui avait du sens avec qui j’étais, avec les valeurs que je portais chèrement, mais surtout, surtout, avec qui je voulais devenir et comment je voulais contribuer à ma communauté. ’Durant ces questionnements, c’est là que j’ai découvert et compris tout le sens des mots de notre sage et chère Maya Angelou: «Le succès, c’est de s’aimer, d’aimer ce qu’on fait et d’aimer la façon dont on le fait !» (Tu te doutes bien que ces mots m’ont guidée et me guident encore dans presque toutes mes décisions. C’est devenu mon adage!) 

J’avais aussi compris que la majorité des jeunes adultes faisaient face aux défis que j’avais rencontrés. Suite à cette constatation, j’ai décidé que je pourrais devenir une personne ressource pour les jeunes qui vivent ce passage de l’adolescence à la vie adulte. Ce processus aboutit, après plusieurs années de travail, à l’obtention d’un diplôme de maîtrise en travail social. Mon mémoire de maîtrise se dédie à l’étude de l’anxiété chez les jeunes adultes. J’ai ensuite travaillé plusieurs années en intervention dans le milieu communautaire et dans la communauté universitaire. Ces années de travail m’ont permises d’acquérir une riche expérience et de confirmer mes passions pour le rétablissement en santé mentale et pour le développement humain. 

En 2025, j’ai créé Co·daz à l’image de ce qui me passionne et de ce que je souhaite léguer à ma communauté: Une entité authentique et bienveillante envers les personnes qui éprouvent des défis liés à la santé mentale et qui osent demander du soutien. Un espace qui facilite à la fois le partage et l’accès aux services psychosociaux, notamment pour les jeunes adultes. Une entreprise qui honore le parcours de la jeune adulte que j’étais et les valeurs de l’adulte que je suis devenue. 

Avec un brin d’humour et une bonne dose d'authenticité (et sans l’utilisation de l’IA),  

Rédigé par Jade Lemieux Leclerc

Travailleuse sociale et fondatrice de Co·daz

Co·daz offre une diversité de services psychosociaux pour les adultes et jeunes adultes. Si tu as besoin de soutien émotionnel et psychologique, n’hésite pas à RÉSERVER UN RENDEZ-VOUS. Si tu vis de la détresse psychologique, je t’invite à appeler à l’info-sociale du Québec en composant le 811 option 2 ou à faire appel aux services de ressources comme Tel-Aide Québec.

Pour en savoir plus sur Co·daz, je t’invite à visiter le site web en cliquant ICI. Si tu désires partager un témoignage, commenter un artcle, discuter ou en savoir plus sur mes services, je t’invite à me contacter en cliquant ICI.

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